L’intelligence artificielle transforme peu à peu le paysage éducatif en France. Entre usages croissants chez les élèves, retards de formation chez les enseignants, et initiatives gouvernementales en cours, l’IA s’impose comme un enjeu central de l’éducation du futur. Cette synthèse explore les données clés issues de plusieurs études récentes pour dresser un portrait complet : état de l’équipement numérique, usages pédagogiques, projets d’IA comme MIA Seconde, et cadre réglementaire en construction.
Comment cette étude a-t-elle été menée ?
Cet article s’appuie principalement sur les résultats de l’Étude GoStudent sur l’Éducation du Futur 2025, réalisée en partenariat avec le cabinet Opinium. L’enquête a été conduite en ligne entre le 6 novembre et le 3 décembre 2024, auprès d’un panel de 5 859 enfants âgés de 10 à 16 ans, accompagnés de leurs parents ou tuteurs, ainsi que de 300 enseignants.
Les répondants proviennent de six pays européens : la France, l’Autriche, l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et le Royaume-Uni. L’échantillonnage a été pensé pour refléter la diversité des profils, en prenant en compte :
- la répartition par âge et sexe des enfants, parents et enseignants ;
- des niveaux variés de confiance en soi et de performance scolaire chez les élèves ;
- la diversité des types d’établissements (sélectifs, non sélectifs et privés).
Pour compléter cette approche, des enseignants de toutes disciplines et niveaux ont été interrogés via un questionnaire en ligne d’environ 15 minutes, diffusé entre le 4 et le 18 novembre 2024.
Enfin, plusieurs sources en ligne complémentaires ont été intégrées à l’analyse, afin d’apporter un éclairage plus large sur les tendances actuelles dans le domaine de l’éducation et du numérique.
L’équipement numérique à l’école : une montée en puissance
La France continue d’investir massivement dans l’équipement numérique des établissements scolaires, aussi bien dans le primaire que dans le secondaire.
- En 2022, les écoles primaires publiques comptaient en moyenne 9 terminaux mobiles (tablettes, ordinateurs portables) pour 100 élèves, contre seulement 4 ordinateurs fixes pour 100 élèves. À titre de comparaison, dans les collèges et lycées publics, on en comptait 33 ordinateurs fixes et 20 terminaux mobiles pour 100 élèves (Source : Labo Société Numérique).
Établissement |
Nombre de terminaux fixes pour 100 élèves |
Nombre de terminaux mobiles pour 100 élèves |
Nombre d’outils de vidéo-projection pour 100 élèves |
Écoles maternelles |
3 |
3 |
2 |
Écoles élémentaires |
5 |
10 |
4 |
Écoles primaires |
4 |
9 |
3 |
ENSEMBLE 1er DEGRÉ (2022–2023) |
4 |
9 |
3 |
Collèges |
23 |
17 |
6 |
Lycées d’enseignement généraux et technologiques |
43 |
23 |
7 |
Lycées professionnels |
71 |
26 |
11 |
ENSEMBLE 2nd DEGRÉ (2021–2022) |
33 |
20 |
7 |
Source : Enfants et écrans. À la recherche du temps perdu, étude et rapport menés par Alexandre Pascal et Carole Bousquet-Bérard, pour la présidence de la République Française.
- En 2024, en Île-de-France, 60 % des écoles primaires et 70 % des collèges sont désormais équipés de tablettes dans le cadre du plan académique MOBILEC, avec plus de 25 000 terminaux déployés (Source : Académie de Paris).
- À la rentrée 2023, plus de 90 % des élèves du second degré et 53 % des élèves du premier degré disposent d’un ENT (Environnement Numérique de Travail), permettant la gestion des emplois du temps, documents, messagerie, visioconférence pour suivre des cours en ligne, entre autres (Source : Ministère de l’Éducation nationale).
Comment la technologie est employée à l’école ?
L’usage du numérique par les élèves et les professeurs varie selon les disciplines et les niveaux, mais s’est largement généralisé dans le paysage éducatif français.
- Environ 85 % des élèves affirment que de nombreux cours intègrent des activités liées aux TIC (ordinateurs, tablettes, vidéoprojecteurs, etc…) (Source : Raiffet).
- En mathématiques, au collège, 75 % des professeurs déclarent que leurs élèves utilisent des outils numériques (logiciels de géométrie, programmation…) au moins une fois par mois. Ce chiffre grimpe à 96 % si l’on inclut l’usage de la calculatrice (Source : CNESCO).
- En français, 80 % des enseignants de collège et 86 % des enseignants de primaire utilisent des outils numériques en classe au moins une fois par mois (Source : CNESCO).
Les outils les plus utilisés en cours de français sont (Source : CNESCO) :
- Traitement de texte : 61 % (primaire), 56 % (collège),
- Ressources en ligne : 55 % (primaire), 56 % (collège),
- Moteurs de recherche : 49 % (primaire), 54 % (collège),
- Exerciseurs : 42 % à l’école primaire.
- Les enseignants du secondaire utilisent aussi de plus en plus la visioconférence, désormais intégrée dans les pratiques de 54,7 % d'entre eux, pour rendre les cours accessibles aux élèves ne pouvant pas être présents en salles de classe. (Source : Académie de Paris).
- Les tableaux numériques interactifs (TNI) restent prépondérants : la majorité des usages en classe se fait via TNI projetant des ressources, et non via écrans individuels (Source : Le Monde).
- D’après la DEPP (Direction de l'Évaluation, de la Prospective et de la Performance) et la DNE (Direction du Numérique pour l'Éducation), en 2023, les vidéoprojecteurs sont présents en moyenne à hauteur de :
- 3 outils de vidéoprojection pour 100 élèves dans les écoles primaires,
- 7 outils dans le second degré (collèges et lycées).
- 77,4 % des enseignants utilisent le numérique pour illustrer et enrichir leur cours, et 55,5 % créent des situations d’apprentissage plus interactives grâce à des ressources visuelles (schémas, vidéos, animations) (Source : DANE, Académie de Paris via Café pédagogique).
- L’usage de la salle informatique a fortement chuté : de 74,8 % en 2020 à 30,3 % en 2024, remplacé par des outils comme des tablettes, des ordinateurs, ou autres supports numériques (Source : Académie de Paris)
Outils utilisés en classe, d’après le sondage 2024 de la DANE de l’Académie de Paris, auprès de 3 793 enseignants du second degré :
- 81,3 % utilisent un vidéoprojecteur chaque semaine ou plus, principal outil numérique en salle.
- 31,7 % utilisent des TNI / ENI (tablettes, vidéo projecteurs, ordinateurs), un usage en hausse grâce aux plans d’équipement régionaux lancés en France.
- 40,3 % font usage d’outils nomades comme des tablettes ou baladeurs numériques.
- 9,6 % seulement utilisent des salles multimédia régulièrement.
- 16,9 % déclarent utiliser les smartphones des élèves dans leurs pratiques pédagogiques, malgré les restrictions.
Usages pédagogiques en classe, toujours après le sondage 2024 de la DANE de l’Académie de Paris :
- 54 % créent des situations plus interactives en classe avec les outils numériques.
- 28 % ont recours à la différenciation pédagogique numérique pour adapter l’enseignement aux besoins des élèves.
- 38,1 % utilisent des outils numériques pour favoriser la collaboration et les projets de groupe.
- 27,8 % proposent des activités numériques (ex : web radio, blog, journal) pour renforcer l’expression écrite ou orale.
- 17,2 % utilisent le numérique pour valider les compétences PIX des élèves, un chiffre stable, mais relativement bas.
Les nouvelles formes d’évaluation plébiscitées par les professeurs via la technologie, d’après GoStudent :
- 62 % des parents souhaitent de nouvelles méthodes d’évaluation. Ces nouvelles formes d’évaluations pourraient avoir recours à des technologies déjà existantes afin de permettre une meilleure personnalisation des évaluations pour chaque élève, et pourraient également mieux les évaluer sur plusieurs compétences, et non uniquement sur leur capacité de restitution d’informations.
- Par ailleurs, l’étude GoStudent 2025 montre que 74 % des professeurs préfèrent les évaluations par la simulation également.
📌 Note : nous savons combien il est important de faire de l’apprentissage une expérience ludique et enrichissante pour les élèves afin de leur garantir une meilleure compréhension et progression scolaire. C’est pourquoi GoStudent propose précisément des outils comme nos Magic Quizz (pour créer des évaluations et des exercices personnalisés) ou encore notre support ludique GoStudent Learning pour approfondir leur connaissances. |
Autres méthodes plébiscitées par les enseignants selon l’étude GoStudent 2025 :
- 67 % : autoévaluation / évaluation par les pairs. Cette approche, basée sur la confiance, prend en compte le point de vue des camarades de classe d’un élève, en plus de ses propres connaissances de soi, afin d’évaluer ses compétences selon des critères prédéfinis.
- 66 % : portfolio numérique. Il s’agit de dossiers personnels en ligne dans lesquels un élève ou un étudiant rassemble ses travaux, projets, devoirs ou productions numériques (textes, vidéos, présentations, etc.), entre autres éléments, afin de documenter l’évolution des compétences précises dans le temps. Cela est possible via des plateformes comme Mahara, Padlet, OneNote, des ENT, etc…
- 63 % : big data et analyse des apprentissages. Cette approche repose sur l'analyse de données (temps passé, erreurs, réussites, objectifs, …) issues d'outils numériques pour adapter les parcours, anticiper les difficultés et personnaliser l'apprentissage à chaque élève. Ces données proviennent d’outils comme Moodle, ILIAS, Eduvant entre autres.
- 58 % : tests adaptatifs basés sur l’IA (des tests générés pas IA et personnalisés à chaque élève selon des critères précis).
Outil |
Comment ça fonctionne |
Matières concernées |
Milieu d’usage courant |
WIMS |
Plateforme d’exercices interactifs avec génération aléatoire de problèmes ; corrigés automatiques avec feedback immédiat. |
Mathématiques, physique, informatique, langues |
Collège, lycée, université |
PIX |
Plateforme d’évaluation numérique fondée sur des scénarios réels ; les compétences numériques sont testées en contexte. |
Compétences numériques, bureautique, cybersécurité |
Collège, lycée, université (certification nationale) |
Labster |
Laboratoires virtuels immersifs avec quiz et analyses intégrés. |
Sciences naturelles, biotechnologies |
Université, CPGE, lycée scientifique |
PhET |
Simulations interactives en ligne qui reproduisent des expériences de physique, chimie, biologie ; manipulations directes des variables pour observer les effets. |
Physique, chimie, SVT |
Collège, lycée, début d’université |
SimClimat |
Logiciel pédagogique simulant le climat terrestre ; l’utilisateur ajuste des paramètres (température, CO₂, rétroactions) et observe les conséquences sur les graphiques. |
SVT (climatologie) |
Collège, lycée |
Géométrix |
Logiciel de géométrie dynamique avec raisonnement intelligent ; corrige les erreurs de construction, guide l’élève pour établir des démonstrations. |
Mathématiques (géométrie) |
Collège, lycée |
Wooclap / Kahoot! / Socrative / … |
Outils de quiz en temps réel avec réponses interactives ; résultats projetés instantanément pour simuler un environnement d'évaluation. |
Toutes disciplines (évaluations générales, révisions) |
École primaire, collège, lycée, formation continue |
Impact sur les apprentissages : bénéfices et limites
L’usage du numérique en éducation ne fait pas l’unanimité, mais les études révèlent des impacts mesurables.
Contexte Les enquêtes PISA de l’OCDE, qui ont lieu tous les 3 ans, utilisent une échelle standardisée pour comparer les progrès des compétences des élèves de 15 ans dans le monde entier. Cette enquête évalue les compétences des élèves en mathématiques, lecture et sciences. L'échelle de l'étude :
Ces résultats permettent de quantifier la progression scolaire réelle de certains usages pédagogiques, comme les outils numériques, sur les apprentissages, de manière fiable. |
Voici ce que disent les données concernant les effets positifs de la présence de la technologie à l’école, d’après l’OCDE, en collaboration avec la DEPP et CNESCO :
- Les collèges équipés de tablettes individuelles ou de classes mobiles enregistrent une amélioration moyenne de 0,5 points aux évaluations nationales en mathématiques, comparé aux établissements non équipés. Nous pouvons donc noter un progrès léger, mais bien présent. (Source : DEPP, OCDE, CNESCO).
- Les élèves utilisant des outils numériques pendant 1 h maximum par jour voient une augmentation de +15 points en compétences de calcul, logique ou géométrie, confirmant donc un effet favorable quand l’usage est encadré pour des objectifs éducatifs. 1h d’apprentissage accompagné par l’usage de technologue permet donc d’atteindre l’équivalent de 6 mois de progrès en moins de temps. (Source : DEPP, OCDE, CNESCO)
-
Les élèves utilisant des appareils numériques pour des loisirs structurés (des jeux ludo-éducatifs) pendant moins de 1h par jour en classe voient une augmentation de +49 points en mathématiques par rapport à ceux qui passent 5 à 7 h par jour à sur des loisirs numériques. La quantité de temps passée sur les outils numériques est donc cruciale à réguler afin de tirer parti des bienfaits de la technologie de façon optimale. (Source : OCDE)
- Dans une étude à part, le média du gouvernement français, Labo Société Numérique, a également observé en 2024 que l’usage d’exerciseurs numériques basés sur les sciences cognitives, améliore la motivation des élèves de 10 % en français et mathématiques, grâce à la progressivité et l’interactivité des contenus pour apprendre.
Voici ce que disent les données concernant les effets négatifs de la présence de la technologie :
- Une étude menée par Research Gate révèle que 75 % des jeunes utilisant les TICE de façon excessive et ressentent une fatigue cognitive sévère accompagnée par des symptômes d’insomnie, de stress et d’anxiété. (Source : Research Gate)
- Cette même étude révèle par ailleurs que 9 des 16 participants (soit 56 % des étudiants) jugent que l’usage inapproprié du smartphone nuit à la relation enseignant‑élève (manque d’interaction, isolement, etc..), pouvant ainsi affecter la qualité d’apprentissage des élèves.
- Toujours d’après Research Gate, 63 % des étudiants et lycéens interrogés mentionnent une détérioration de leur concentration due à l’infobésité et aux notifications constantes que ces derniers reçoivent sur leurs smartphones et appareils. (Source : Research Gate)
- 58 % des élèves français disent avoir été distraits par leur propre usage d’un appareil numérique pendant au moins un cours de maths, comparé à 65 % en moyenne OCDE (Source : OCDE)
- Selon l’OCDE, dans certains pays, la hausse de présence d’écrans s’accompagne parfois d’effets négatifs sur les résultats scolaires (maths, lecture, sciences), selon le cadre, l’objectif et le contexte d’utilisation des technologies, soulignant que l’usage numérique n’est pas automatiquement facteur de progrès. La technologie doit donc être régulée pour en tirer pleinement profit dans le domaine de l’éducation. (Source : OCDE PISA via CNESCO)
- 43 % des élèves français de 15 ans se disent nerveux ou anxieux lorsqu’ils n’ont pas leur téléphone à portée. Cette dépendance souligne un effet néfaste sur la capacité de concentration des élèves, qu’ils soient en salle de classe ou chez eux, et révèle que ces derniers sont plus susceptibles d’être distraits par leurs appareils (Source : OCDE, PISA 2022, Labo Numérique).
Les enseignants face au numérique
Les enseignants sont globalement engagés dans l’usage du numérique, mais expriment encore des besoins en formation et accompagnement afin de pouvoir utiliser les technologies éducative de façon optimale.
D’après un sondage mené par la DANE de l’Académie de Paris auprès de 3 793 enseignants du second degré en avril 2024 :
- 94,8 % des enseignants utilisent les outils numériques au moins une fois par semaine pour préparer leurs supports de cours, un taux quasi stable depuis 2020 et qui s’élevait à 94,4 % à cette période,
- 93,8 % des enseignants consultent Internet chaque semaine pour rechercher des ressources pédagogiques ; un taux stable par rapport à 2022 (93,8 %).
Toujours d’après le même sondage ; les enseignants se servent également du numérique pour leur travail personnel de préparation :
- 75 % mettent à jour leurs connaissances sur certains domaines via Internet au moins une fois par semaine,
- Seulement 35,1 % consultent régulièrement les portails pédagogiques académiques, une baisse par rapport aux années précédentes.
Les enseignants montrent un besoin croissant de se former au numérique pour accompagner leurs élèves :
- Plus de la moitié (59 %) des enseignants déclare se former via internet, seuls,, et 60 % via des réseaux sociaux professionnels comme Viaéduc ou Twitter, pour enrichir leurs pratiques numériques pédagogiques (Source : Ecolhuma 2023)
- 80 % des formations continues suivies par les enseignants sont des auto-formations (usage de tutoriels, MOOC, webinars, etc.), tandis que les formations institutionnelles structurées en France ne représentent que 20 % (Baromètre Ecolhuma, mars 2023)
D’après le média Kwark Éducation, 45 % des enseignants du primaire estiment avoir besoin d’une formation complémentaire sur les outils numériques, car ils souhaitent :
- maîtriser les outils numériques pour les intégrer dans des séances pédagogiques,
- garantir une utilisation pédagogique efficace,
- être suffisamment formés pour accompagner ces apprentissages dès le plus jeune âge chez leurs élèves.
D’autres données concernant les freins liés aux usages du numérique par les enseignants, d’après la DANE de l’Académie de Paris :
- 35,1 % des enseignants ne signalent aucun frein à l’usage du numérique,
- 28,4 % indiquent un manque de formation ou d’accompagnement de la part des institutions,
- 57,7 % déplorent un manque d’équipements dans leurs établissements,
- 49,3 % citent des problèmes d’infrastructure (réseaux, débit Internet, etc..),
- 31,2 % évoquent des problèmes de ressources numériques (logiciels, manuels, outils),
- 18 % ressentent un manque de dynamisme local, lié aux projets d’établissement ou à l’absence de référents numériques actifs.
Globalement, d’après l’Étude GoStudent sur le Futur de l’Éducation, 67 % des professeurs (et 58 % des parents) estiment que les enfants ne seront pas prêts pour le marché du travail sans accès et formations aux outils en ligne. Ces données soulignent l’importance de former et d’utiliser les outils numériques à l’école dès que possibles pour préparer les élèves à leur avenir professionnel.
Le numérique hors classe : continuité pédagogique et autonomie
Depuis la pandémie, l’usage du numérique en dehors de la classe s’est stabilisé, avec des pratiques régulières chez les enseignants et les élèves. Globalement : d’après une étude menée par l’INSEE (l’enquête ETIC, de 2019), 44 % des lycées généraux et technologiques proposaient des plateformes d’apprentissage accessibles en dehors de l’école, un chiffre en constante progression. Mais concrètement, de quoi s'agit-il, lorsque l’on fait référence aux plateformes d’apprentissage ?
Que sont ces plateformes d’apprentissage ?
Il s’agit d’environnements numériques éducatifs qui permettent aux élèves de :
- accéder à des cours ou documents de révision à distance,
- rendre des devoirs ou faire des exercices en ligne,
- suivre des activités différenciées (personnalisation d’apprentissage) ou autocorrectives,
- faciliter le travail de groupe à distance, via des forums ou documents collaboratifs,
- bénéficier de conseils et d’aide supplémentaire pour les élèves en difficulté ( tutorats à distance, etc..).
Ces plateformes prennent plusieurs formes complémentaires :
- ENT (Environnements Numériques de Travail) : manuels numériques, cours, fichiers, devoirs à rendre…
- Plateformes pédagogiques académiques : Moodle, Pearltrees, Lalilo…
- Espaces numériques proposés par des éditeurs : Éducadhoc, Maxicours, LeLivreScolaire.fr…
- Plateformes institutionnelles : PIX (compétences numériques), Éduthèque (ressources culturelles), Colibri (ressources adaptatives).
Dans quelles disciplines sont-elles utilisées ?
Ces plateformes sont transversales, mais particulièrement utiles dans les matières suivantes :
Discipline |
Usages numériques spécifiques |
Mathématiques |
Exerciseurs, géométrie dynamique (GeoGebra), quiz interactifs |
Sciences |
Simulations virtuelles, quiz interactifs |
Français |
Rédaction collaborative, lecture partagée, annotations |
Langues vivantes |
Podcasts, vidéos, entraînements oraux |
Sciences numériques (SNT) |
Programmation, robotique, simulations interactives |
Histoire-Géographie |
Cartes interactives, capsules vidéo, recherches dirigées |
Ce que l’on observe chez élèves :
- En 2019, 97 % des collégiens déclarent effectuer du travail scolaire à la maison, dont 68 % via le programme « Devoirs faits », souvent en lien numérique hors présentiel (Source : Éducation nationale)
- Entre 2019 et 2021, près de 60 % des 15‑24 ans ont suivi des cours en ligne, un usage en baisse depuis les confinements, mais toujours significatif hors plateforme scolaire (Source : Insee Focus, 2024)
Ce que l’on peut observer parmi les enseignants, d’après la DANE :
- L’usage des ENT est désormais généralisé, avec 79,1 % des enseignants qui les utilisent pour échanger avec leurs élèves et partager du contenu pédagogique avec eux, et 75 % pour collaborer entre collègues.
- Après un pic post‑COVID, en 2024, 55,7 % des enseignants publient désormais leurs cours en ligne pour soutenir les élèves hors la classe (contre 64,6 % en 2022 et 43,1 % en 2020).
- 30 % des enseignants déclarent utiliser le numérique pour assurer un accompagnement individuel des élèves en dehors du temps scolaire. Cette proportion est en progression par rapport à 2020 (27,9 %), a atteint un pic en 2022 (32,6 %), et se stabilise à 30 % en 2024.
Comment les élèves utilisent-ils la technologie pendant en dehors de l’école pour apprendre ?
Même hors de la salle de classe, les enfants utilisent massivement la technologie pour apprendre, découvrir et s’autoformer.
- D’après un sondage mené par l’IFOP, les appareils préférés des jeunes pour apprendre à la maison sont les téléphones et les tablettes, souvent utilisés pour visionner des contenus éducatifs. 70 % des jeunes de 10 ans en France possèdent un smartphone — ce qui indique que l’accès aux ressources en ligne commence dès un jeune âge et influe sur les usages éducatifs en autonomie plus tard.
- D’après GoStudent & CNESCO, une majorité d’élèves préfèrent les vidéos pédagogiques, jugées plus engageantes et accessibles. L’usage de plateformes comme YouTube pour des tutos, révisions ou vulgarisations scientifiques est courant.
- En 2022, 84 % des jeunes de 15 ans utilisaient internet au moins 2 h par semaine pour s’autoformer ou réviser pour des examens pour des projets scolaires (fiches de révision en ligne, tutoriels, etc…) (Source : OCDE)
- 69 % des adolescents utilisent les outils numériques pour regarder ou écouter du contenu éducatif (tutos, podcasts pour apprendre à faire quelque chose). (Source : OCDE)
D’après RAIFFET :
- Presque 80 % des étudiants utilisent des simulateurs et logiciels spécialisés (ex. Matlab, etc.) au moins quelques fois par semaine pour assimiler les cours abordés en salle de classe.
- Près de 90 % des étudiants apprennent leurs leçons en utilisant les moteurs de recherche sur Internet plusieurs fois par semaine – aucun n’a déclaré ne jamais les utiliser
- 90 % estiment que les TIC améliorent leurs résultats dans les devoirs et exercices.
- Environ 90 % déclarent que les TIC les aident à mieux comprendre les cours, notamment grâce aux illustrations informatiques.
- 92,5 % considèrent Internet comme le lieu principal pour compléter leurs cours.
Les réseaux sociaux comme outils pour apprendre
Toujours selon les recherches de RAIFFET et le Média Innovations.fr :
- 66 % des enfants en primaire et 62,7 % en secondaire utilisent des applications de vidéos courtes (TikTok, Kwai…) pour apprendre ou se divertir.
- 71 % des enfants de 3 à 10 ans regardent des contenus vidéo éducatifs sur les réseaux sociaux, et 54 % utilisent des applications ludo-éducatives pour apprendre, une pratique qui prolonge l’apprentissage dès le plus jeune âge (Ifop, 2024).
- Dans un autre cadre, 40 % des étudiants universitaires jugent que l’usage pédagogique des réseaux sociaux renforce la motivation ; 47,5 % pensent qu’il améliore les échanges avec les enseignants.
- Un tiers (soit environ 33%) des élèves de 3ᵉ ont utilisé Revyze au moins une fois pour réviser le brevet en 2024 (Source : Innovations.fr)
- Revyze a 150 millions de vues cumulées pour les 40 000 vidéos et quiz proposés via les “capsules (Source : Innovations.fr)
D’après l’entreprise Notta AI :
- Parmi toutes les catégories présentes sur TikTok, l’enseignement supérieur atteint le taux d’engagement le plus élevé, avec 16,26 %, devant les secteurs du sport et du voyage.
- Une étude de l’Université d’Arizona montre que les étudiants universitaires qui suivent régulièrement du contenu éducatif sur TikTok ont obtenu en moyenne 11 points de mieux à leurs examens que ceux qui ne le faisaient pas.
Les usages éducatifs et numériques à la maison
- 96 % des 15‑ans en France vivent dans un foyer équipé d’au moins trois appareils numériques (ordinateur de bureau, portable ou tablette) (Source: OCDE)
D’après Fondation Enfance, 83 % des parents déclarent utiliser le numérique pour accompagner l’apprentissage de leur enfant :
- 71 % regardent des vidéos éducatives ensemble,
- 54 % utilisent des applications ludo-pédagogiques adaptées aux besoins de leur enfant,
- 26 % ont déjà proposé à leur enfant d’utiliser une intelligence artificielle pour faire leurs devoirs.
L’intelligence artificielle et ses nouveaux usages scolaires
L’IA éducative s’infiltre de plus en plus dans les usages scolaires, bien que son adoption reste encore émergente et prédominante chez les élèves. Les outils IA numériques, eux, ne sont pas encore généralisés au sein des établissements scolaires. Ainsi, comment les élèves utilisent-ils l’IA ? Qu’en est-il de l’usage de ces outils par les professeurs ? Et comment s’adaptent les établissements éducatifs à cette nouvelle avancée technologique ?
86 % des étudiants en France utilisent l’IA dans leurs études, dont plus de la moitié au moins une fois par semaine (Source : OCDE et GoStudent).
L’intelligence artificielle et ses usages parmi les élèves
Ce que l’on découvre concernant l’usage d’outils IA par les élèves, d’après l’étude GoStudent 2025 :
- 63 % des enfants souhaitent que leurs enseignants en sachent plus sur l’IA,
- 21 % des enfants utilisent déjà l’IA pour réussir leurs examens, et 28 % pour améliorer leur travail,
- 1 élève sur 3 déclare avoir déjà utilisé une IA générative (comme ChatGPT) pour l’aider à faire ses devoirs,
- 50 % des élèves estiment que leurs enseignants utilisant l’IA améliorent leur apprentissage,
- 24 % des élèves français en classe utilisent des outils d’IA en cours, et 16 % pour rédiger des dissertations, 43 % pour les langues (via des outils comme ChatGPT ou encore similaires à GoMigo, etc…),
- 65 % affirment employer les IA génératives pour améliorer leur productivité, 62 % pour gagner du temps, et 40 % pour stimuler leur créativité.
Ce que réclament les professionnels éducatifs
- 75 % des professeurs ne sont pas formés à l’IA, bien que 56 % souhaitent l’être,
- 46 % des professeurs pensent que les enfants sans accès à l’IA risquent de prendre du retard scolaire,
- 35 % des professeurs aimeraient que les enfants aient accès à des outils d’IA générative et 29 % à des assistants rédactionnels IA.
Les initiatives gouvernementales pour incorporer l’IA au secteur éducatif
- Seulement 11 % des élèves français ont accès à l’IA dans leur établissement scolaire, un retard notable par rapport à l’Allemagne (38 %) ou le Royaume‑Uni (20 %) (Source : GoStudent, 2025).
- Malgré une adoption massive de l’IA par les élèves, seuls 20 % des enseignants l’utilisent régulièrement dans leur pratique professionnelle. Pour tenter de pallier ce retard, un appel à projets de 20 millions d’euros via le plan d’investissement “France 2030” vise à développer une IA souveraine dédiée aux enseignants, attendue pour la rentrée 2026‑27 (Source : Éducation.gouv).
- En parallèle, une formation obligatoire à l’IA sera déployée dès la rentrée 2025 pour tous les élèves de 4ᵉ et de 2de, avec des modules sur le prompting, les IA génératives, la gestion des données et les impacts environnementaux. Ce parcours, proposé sur la plateforme Pix, sera également accessible à l’ensemble des collégiens, lycéens et enseignants volontaires, dans le but de promouvoir l’usage des technologies IA ainsi que davantage former les enseignants à ces compétences (Source : Éducation.gouv).
MIA Seconde, l’outil IA pour un apprentissage personnalisé
- MIA Seconde (Modules interactifs adaptatifs) est une plateforme d’IA d’apprentissage et d’accompagnement personnalisée pour les élèves de seconde, lancée en septembre 2024. Elle propose 20 000 exercices adaptatifs répartis en 24 modules de mathématiques et français, accessibles en salle de classe et à domicile, sur smartphone et tablette (Source : Éducation.gouv).
- La plateforme a connu sa première phase d’expérimentation en mars 2024 dans 25 classes pilotes en Île‑de‑France, son déploiement s’est ensuite étendu à huit académies et environ 150 lycées, ciblant environ 200 000 élèves au démarrage. Après une première phase d’expérimentation réussie, son déploiement national est prévu la rentrée scolaire en septembre 2025 (Source : Éducation.gouv).
Un premier cadre d’utilisation d’IA national voit le jour
Un cadre national d’usage de l’intelligence artificielle en éducation a été publié le 14 juin 2025. Ce dernier établit des lignes directrices claires et des conditions précises pour encadrer l’utilisation de l’IA dans les établissements scolaires français. Ce cadre a été élaboré à la suite d’une consultation nationale impliquant plus de 500 contributions de la communauté éducative (enseignants, personnels administratifs, parents d’élèves et élèves eux-mêmes). Voici ce qu’il faut retenir de ce guide :
- Ce premier cadre officiel n’autorise uniquement les élèves en classe de 4ème à utiliser des outils IA comme ChatGPT de façon autonome en cours.
- Les professeurs, eux, pourront y avoir recours pour enseigner dans leur quotidien, et notamment pour sensibiliser et former les élèves aux usages éthiques et responsables d’outils IA.
- Il s’agit d’un tout premier test afin d’observer quels sont les premiers impacts de l’incorporation de l’IA dans les établissements éducatifs.
- Si cette phase de test s’avère concluante, le cadre sera actualisé et élargi, permettant un usage plus large dans l'ensemble des classes et établissements, avec des règles et une formation améliorées.
Pourquoi moderniser le système éducatif avec l’IA devrait être une priorité ?
L’usage de l’IA progresse… surtout chez les élèves
Aujourd’hui, 86 % des élèves français utilisent l’IA dans leurs études, dont plus de la moitié au moins une fois par semaine. Pourtant, seuls 20 % des enseignants intègrent ces outils dans leurs pratiques pédagogiques. Ce décalage crée un déséquilibre préoccupant, où les élèves explorent seuls des technologies qu’ils ne sont pas toujours préparés à utiliser de manière critique ou constructive.
Former les enseignants : une urgence nationale
Alors que 75 % des enseignants ne sont pas encore formés à l’IA, plus de la moitié (56 %) déclarent vouloir l’être. Les technologies d’IA évoluent rapidement, et sans formation adaptée pour suivre, les enseignants risquent de perdre les capacités nécessaires pour accompagner et enseigner la jeunesse correctement. L’objectif n’est pas de remplacer les professeurs avec l’IA comme nombreux peuvent craindre, mais bien de les permettre de suivre les nouvelles avancées technologiques et les nouveaux besoins sociétaux qui en découleront.
Lutter contre les inégalités entre établissements
D’après l’étude GoStudent 2025, les écoles privées disposent plus souvent d’enseignants formés à l’IA et d’outils d’aide aux devoirs numériques, contrairement aux écoles publiques. Cette disparité risque de creuser un fossé éducatif encore plus profond. Pour garantir l’équité, il est essentiel que l’État investisse massivement dans l’équipement et la formation dans tous les établissements, publics comme privés, afin de prévenir que de nouvelles inégalités ne surviennent.
Des projets existent, mais ils doivent s’intensifier
Des initiatives comme MIA Seconde ou encore l’appel à projets de 20 millions d’euros via France 2030 pour créer une IA souveraine dédiée aux enseignants, montrent que les bases sont posées. Mais ces projets doivent être généralisés, évalués et renforcés davantage pour créer un véritable écosystème pédagogique autour de l’IA.
Une transformation qui nécessite un engagement collectif
Moderniser l’éducation avec l’IA ne peut reposer uniquement sur les enseignants ou les élèves. Cela nécessite une implication conjointe des gouvernements, des rectorats, des établissements et des familles. C’est en créant un cadre clair, éthique et équitable, soutenu par des moyens concrets, que l’IA pourra devenir un levier d’inclusion, de performance scolaire, et de préparation au monde professionnel de demain.
L’IA, un levier puissant pour l’enseignement personnalisé
L’intelligence artificielle offre un potentiel unique pour adapter l’enseignement aux besoins spécifiques de chaque élève. L’IA peut proposer des exercices ciblés, des explications sur mesure et un suivi en temps réel. Ce type de suivi personnalisé, difficile à assurer à grande échelle par les seuls enseignants, permettrait de mieux accompagner les élèves en difficulté, de renforcer l’autonomie des apprenants, et de réduire les écarts de niveau au sein des classes, notamment grâce aux cours particuliers.